Que retenir des législatives (en attendant la dissolution)

Que retenir des législatives (en attendant la dissolution)

Le second tour des législatives aura fait de nombreux déçus et un grand perdant. Pour autant, est-ce le moment d’éteindre sa télévision pour reprendre une activité normale ? La politique ne se limite pas aux élections, et le résultat de celles-ci risque d’en appeler d’autres plus rapidement que prévu… Pour y voir plus clair, cet article vous propose une synthèse de la séquence politique et électorale qui s’achève, avant de discuter des perspectives pour la suite.


Cet article a été initialement publié sur ma newsletter « Old fashioned » hébergé chez « Substack » . Pour lire la version originale, au format plus lisse, c’est par ici => https://politicoboy.substack.com/p/apres-les-legislatives-a-quoi-bon
Les législatives se présentaient comme un duel entre deux projets : celui du « bloc bourgeois1 » emmené par Emmanuel Macron et celui de la NUPES conduite par Jean-Luc Mélenchon. Au final, le second tour n’aura permis à aucun des deux de s’imposer, laissant le troisième pôle incarné par l’extrême droite se poser en grand vainqueur de l’élection.

Ceux qui espéraient une bifurcation écologique et la fin des politiques néolibérales de destruction des services publics et suppression des acquis sociaux ont de quoi s’arracher les cheveux devant cette occasion perdue. Il aura manqué deux à trois dizaines de milliers de voix à la NUPES pour obtenir une majorité relative, selon le décompte du journal Le Monde

Le contexte semblait pourtant favorable : une union de la gauche jamais vue depuis 15 ans, conduite par un Mélenchon venant de manquer le second tour des présidentielles de quelque quatre cent mille voix, sous fond de canicule record et d’inflation galopante. Pourtant, les électorats les plus favorables à cette offre politique se sont massivement abstenus, empêchant la NUPES d’obtenir suffisamment de députés pour pouvoir gouverner le pays. Un échec qui ne doit pas masquer une réussite indiscutable : la défaite d’Emmanuel Macron.

Macron dévisse, la gauche progresse

La macronie passe de 350 à 245 députés. De nombreux cadres d’En Marche mordent la poussière. Les ministres Amélie de Montchalin (Transition énergétique, battue par la NUPES), Brigitte Bourguignon (Santé, battue par le RN) et Justine Benin (Outre-mer, battue par la NUPES) devraient être contraints de quitter le gouvernement. Les anciens ministres Jean-Michel Blanquer et Roxana Maracineanu sont également déchus. Comme les deux principaux piliers de la macronie Richard Ferrand (président de l’Assemblée nationale sortante) et Christophe Castaner (président du groupe LREM). À cela, il faut ajouter la défaite de Manuel Valls et de nombreux députés sortants importants : le principal allié d’Édouard Philippe Pierre-Yves Bournazel, Patrick Mignola (président du groupe MoDem de Bayrou ), Florian Bachelier (Questeur à l’Assemblée) et Laurent Saint-Martin (Rapporteur au Budget). 

Selon les propos recueillis en « off », le gouvernement a été sonné par ce résultat. Il y a tout juste trois semaines, Macron pensait obtenir la majorité absolue uniquement avec En Marche ! (qui n’obtient que 160 députés). Il va devoir composer avec Bayrou (MoDem) et Philippe (Horizon), mais également avec LR, voire plus. D’où cette notion de « France ingouvernable » qui a émergé dès l’annonce des résultats. En effet, face au refus des autres partis de former une coalition, Macron va devoir chercher des alliances « au cas par cas » sur chaque projet de loi, y compris le vote du budget. Une perspective qui a suffisamment traumatisé l’Élysée pour que les ténors de la macronie évoquent des alliances avec le Rassemblement National… 

Cette claque électorale découle d’une stratégie cynique aux effets désastreux. Persuadé que la logique des institutions lui donnerait la majorité, Macron n’a pas fait campagne, déployant des efforts considérables pour encourager l’abstention. Elizabeth Borne a refusé toutes les propositions de débats, comme Macron à la présidentielle. LREM n’a présenté aucun programme détaillé ni cherché à mettre en avant le moindre thème de campagne. Malgré l’inflation et la récession économique, Emmanuel Macron a mis trois semaines pour constituer un gouvernement technocratique, puis a refusé de convoquer l’Assemblée nationale (qui lui était encore acquise) pour faire adopter un texte sur le pouvoir d’achat. Un projet dont les contours sont restés remarquablement flous et le manque d’ambition presque insultant. À deux jours de l’élection, LREM vantait encore son chèque de soutien aux ménages les plus précaires (de 50 à 150 euros) et la suppression des 138 euros de la redevance télévisée pour la fin de l’année. Ce faisant, Macron a ouvert la porte au RN, dont la solution démagogique de baisse de la TVA a été jugée plus crédible par les économistes de plateaux que le blocage des prix combinés aux hausses de salaires proposés par la NUPES (et pourtant déjà en place dans de nombreux pays). 

Au lieu de se focaliser sur l’inflation, Macron avait préféré faire campagne sur la très impopulaire réforme des retraites. Un sujet évité comme la peste par les candidats LREM aux législatives. Résultat, la campagne s’est limitée à diaboliser la NUPES sans débattre de ses propositions. Certaines professions de foi de candidats En Marche accusaient la NUPES d’être en dehors de la république (sic) sans apporter d’arguments ni opposer de propositions programmatiques concrètes. Dans la 6e circonscription des Alpes Maritimes, le tract de Jean-Bernard Mion, investi par En Marche!, ne mentionnait aucune politique nationale. Mion a fait campagne sur des problématiques locales, qui ne relèvent pas de la compétence d’un député : les horaires des transports publics et l’immatriculation des trottinettes électriques (une plaie sur les routes de l’arrière-pays niçois, paraît-il). Il a été sèchement battu par le RN, comme la moitié des candidats macronistes opposés à l’extrême droite au second tour. 

Suite à sa tentative d’enjambement des législatives, Macron est logiquement sanctionné. Jamais un président fraîchement élu n’avait perdu cette élection imperdable. Mais ce revers ne suffit pas à installer Mélenchon à Matignon.

Pour priver la NUPES d’une majorité, Macron a renoncé à combattre l’extrême droite tout en diabolisant la gauche. Il paye ce choix par la perte de sa majorité absolue au profit d’un nombre inédit de députés RN.

Pour la NUPES, le verre est à moitié plein. Avec 145 députés, la gauche triple son poids à l’Assemblée. LFI obtient également la présidence de la puissante Commission des finances. Les petits partis humiliés à la présidentielle reprennent des couleurs. Comme le prévoyait la répartition des circonscriptions, EELV (23 élus), le PS (31 élus) et le PCF (12 élus + des soutiens issus des DOM-TOM) obtiennent chacun un groupe à l’Assemblée. Quant à LFI, elle passe de 17 députés à 75, une progression remarquable… mais insuffisante. En cause, l’abstention massive des jeunes et des quartiers populaires. Mélenchon a beau avoir forcé le sujet des violences policières dans la campagne, puis appelé par tous les canaux et moyens la jeunesse à se mobiliser (humour sur Twitch, TikTok et autres réseaux sociaux ; interpellation sur Quotidien, posture moralisatrice sur France 2 et BFM…), cet électorat clé de la gauche s’est massivement abstenu. Le résultat d’une dépolitisation structurelle et de tendances historiques difficiles à inverser. Selon les enquêtes d’opinion, le fait que les législatives étaient perçues comme perdues et sans enjeu comptent parmi les principales causes de l’abstention. Les médias auront largement contribué à cette perspective erronée. 

Puisque le PS, EELV et le PCF ont refusé de constituer un seul et unique groupe parlementaire “NUPES”, le Rassemblement national sera le premier groupe d’opposition à l’Assemblee, devant LFI. Une situation qui découle du score inédit de l’extrême droite. Cette performance s’explique par une convergence de facteurs et est déjà lourde de conséquences très préoccupantes.

La mort du “front républicain” offre un score historique au Rassemblement national

Pour analyser le résultat du RN, il faut partir de Frédéric Boccaletti. Frédéric Boccaletti a fait six mois de prison ferme pour violence avec arme à feu et tenait une librairie spécialisée dans les ouvrages négationnistes et antisémites, selon la presse locale. Malgré ce profil sulfureux, pour ne pas dire disqualifiant, Boccacletti a été investi candidat à la députation par le Rassemblement National dans le Var. Il a battu la candidate En Marche Cécile Muschotti d’un peu plus de 1500 voix.

Il ne s’agit pas du seul profil problématique. Pourtant, le danger RN n’a pas été mis en avant lors de la campagne législative ni par les médias, focalisé sur le “spectre” de la NUPES, ni par la majorité présidentielle.

Si on se place dans la perspective de Macron et Le Pen, il faut d’abord l’emporter de concert dans le conflit sur la structure du conflit politique avant de pouvoir vraiment se combattre. Et leur adversaire commun dans cette lutte sur la structure du conflit, c’est la gauche. Stefano Palombarini à Contretemps

LREM a uniquement fait campagne contre la NUPES et refusé de donner une consigne de vote lorsqu’elle était opposée au RN au second tour. Sur les 62 duels gauche unie contre extrême droite, seuls 7 candidats marcheurs ont appelé au barrage républicain. Aucun des trois candidats En Marche arrivés derrière le candidat NUPES dans une triangulaire ne s’est retiré, alors que l’inverse a été observé côté NUPES. Si cette dernière oscillait entre la consigne “pas une voix pour le RN” et l’appel au front républicain, les candidats soutenus par Macron sont parfois allés jusqu’à solliciter les voix du RN pour battre les candidats LFI dans une forme de “front républicain” inversé. 

Surtout, en renvoyant systématiquement dos à dos le RN et la NUPES, Emmanuel Macron et ses soutiens ont découragé la constitution d’un front républicain. Non seulement leurs électeurs n’ont pas fait barrage au RN, mais ceux de la NUPES non plus.

Le résultat est lapidaire. Selon un sondage de l’IFOP, en cas de duel RN-NUPES, 72% des électeurs d’Ensemble se sont abstenus, 16 % ont voté pour la NUPES et 12% pour le RN. Le RN gagne ainsi 57% de ses duels contre la NUPES (et 52 % contre Ensemble). 

La mort du front républicain est d’autant plus préoccupante qu’elle s’inscrit dans un contexte de forte progression du vote RN, qui témoigne de son implantation grandissante. L’extrême droite passe de 3.3 à 5.2 millions de voix entre 2017 et 2022, sans avoir fait campagne ! Or, historiquement, le mode de scrutin des législatives désavantage l’extrême droite. En plus de démobiliser son électorat (plus populaire et abstentionniste que ceux de la droite et du centre gauche), la configuration en deux tours permet normalement la mise en place de fronts républicains permettant de faire échec au RN, qui n’avait obtenu “que” 8 députés en 2017. 

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Cette progression s’explique par divers facteurs. Les politiques néolibérales menées par Macron et ses prédécesseurs fabriquent du mécontentement, qui favorise le RN. Ce dernier n’a rien besoin de proposer pour récolter les fruits de la colère, d’autant plus que ce parti rempli de dangereux néofascistes a été largement dédiabolisé au fil des années. 

La banalisation de l’extrême droite voulue par Macron (dont les ministres ont repris le vocabulaire et les obsessions, allant jusqu’à déplorer que Marine Le Pen soit “molle” sur l’islamisme) s’est doublée d’un procès en anti-républicanisme asséné à l’ensemble de la NUPES. Ce discours, largement amplifié par les médias de masse, a produit ses effets. Les Français ont désormais une meilleure opinion de Marine Le Pen que de Macron et Mélenchon, et jugent la NUPES aussi dangereuse que le RN, selon des enquêtes d’opinion récentes. En excluant la NUPES du “cercle de la raison” et de la “république”, les macronistes et les économistes et médias qui soutiennent plus ou moins implicitement le gouvernement ont pavé la voie à l’extrême droite. Une anecdote l’illustre parfaitement.

Dans le 20h de France 2, un reportage sur les causes du vote RN montrait plusieurs automobilistes reconnaître, à visage découvert, avoir voté RN pour le pouvoir d’achat. Non seulement voter pour l’extrême droite ne suscite plus la honte, mais les raisons invoquées auraient de quoi provoquer le ridicule si les médias et les candidats de Macron avaient fait leur travail. Penser que le RN (opposé aux revendications salariales, à la hausse des salaires et à la taxation et redistribution des super profits) va agir pour le pouvoir d’achat est absurde. Du reste, leur proposition de baisse de la TVA n’aurait qu’un effet très limité, tout en étant financé par l’État – donc in fine l’automobiliste. Mais comme l’écrit Romaric Godin, en refusant de prendre le problème de l’inflation et la question sociale à bras le corps, tout en concentrant ses attaques non argumentées contre la NUPES, la macronie a ouvert un boulevard au RN. Baisser la TVA étant jugée plus orthodoxe que l’augmentation des salaires combinée au blocage des prix, pourtant seule stratégie susceptible de redonner du pouvoir d’achat

Le RN réalise ainsi un score historique, tout en se débarrassant une fois pour toutes des dissidences incarnées par Éric Zemmour. 

Macron et LR vers une alliance objective avec le Rassemblement national ?

Loin d’avoir servi de leçon à Emmanuel Macron et la classe politico-médiatique marquée au centre et à droite, la percée du RN est accueillie avec une bienveillance consternante.

Dès l’annonce des résultats, de nombreux cadres de la macronie ont revendiqué vouloir chercher les voix du RN pour gouverner. Contrairement à ces prédécesseurs, Emmanuel Macron a fait de Marine Le Pen une interlocutrice légitime, l’invitant à l’Élysée lors de son tour de table des dirigeants de parti politique pour discuter de la formation d’un gouvernement d’Union nationale. Devant le tollé suscité, Macron a exclu de gouverner avec le RN et la NUPES, renvoyant une nouvelle fois dos à dos les deux formations “extrémistes”. 

Aurore Bergé, désormais présidente du groupe parlementaire En Marche à l’Assemblée nationale, a expliqué qu’il était difficile de dire qui, de François Ruffin ou de Marine Le Pen, était le plus républicain (sic). 

Le dernier enjeu des législatives était l’attribution des postes de pouvoirs au sein de l’Assemblée nationale. Dès les votes pour la direction de l’Assemblée, une curieuse tambouille a permis au RN d’obtenir deux vice-présidences sur 6, grâce aux voix de centaines de députés LREM ayant préféré l’extrême droite aux candidatures d’EELV. De son côté, le RN a joué son rôle pour barrer la route à la NUPES pour les 3 places de questeur (lire ce fil à ce sujet). La gauche soupçonnait ainsi un large accord LR-LREM-RN pour s’attribuer les postes, avec en ligne de mire la puissante présidence de la Commission des finances. Une fonction qui permet d’examiner les projets de budgets avant que ceux-ci ne passent dans l’hémicycle, de saisir des documents au ministère des Finances, de lever le secret fiscal et de réaliser des contrôles fiscaux sur les entreprises et particuliers.

Gérard Larchet, président LR du Sénat, a explicitement appelé à offrir cette présidence (qui revient à l’opposition) au Rassemblement National. Francois Bayrou avait jugé qu’il était hors de question qu’elle revienne à la NUPES. Éric Woerth, ancien ministre du Budget de Sarkozy et président sortant de la Commission des Finances, qui vient de se rallier à Macron, a explicité les raisons de cette complaisance envers le RN :

Déjà sous le feu des critiques pour ses votes en faveur de candidats RN pour d’autres postes clés, la majorité présidentielle a respecté l’usage en s’abstenant de prendre part au vote. Après un feuilleton rocambolesque (incluant de multiples demandes de suspension de séance du RN et LR pour négocier un accord visant à faire barrage au candidat NUPES-LFI) Éric Coquerel (LFI) a été élu à la présidence de cette puissante commission. Au grand dam de la presse conservatrice et libérale. Certains députés avaient envisagé une présidence tournante LREM-UDI-LR-RN, renouant avec le vieil adage “plutôt Hitler que le Front populaire” (qu’il conviendrait d’adapter en “plutôt l’extrême droite qu’un contrôle fiscal”). 

Le RN apparaît ainsi comme un allié objectif de la droite de gouvernement, de moins en moins encline à se priver de son soutien.

Des nouvelles législatives dans les 12 prochains mois ?

Contrairement au récit médiatique, la France n’est pas nécessairement ingouvernable. Si Emmanuel Macron a exclu de faire le moindre compromis sur son projet politique, comme c’est l’usage dans les autres démocraties, le RN semble disposé à apporter son soutien à la majorité présidentielle au cas par cas, comme le fera vraisemblablement la droite LR. Ou du moins, de s’abstenir de voter contre. On peut donc imaginer un scénario où Macron gouverne à coup de décret, directives, et de 49-3 (bien que l’usage de ces outils soit limité) tout en expédiant les affaires courantes et reformes plus consensuelles avec le soutien épisodique de la droite ou de l’extrême droite.

Reste qu’en théorie, le gouvernement n’est pas légitime pour gouverner, puisqu’il doit recevoir un vote de confiance du parlement. Or, un tel vote n’est pas acquis à Elizabeth Borne. Il semble inimaginable au RN et à la NUPES de voter pour, puisque cela équivaut à renoncer à faire partie de l’opposition. Quand à la droite LR, un tel vote reviendrait à participer implicitement à la majorité présidentielle, ce qui rendrait LR comptable du bilan de Macron et signerait l’arrêt de mort du parti.

Ce vote de confiance s’annonce donc compliqué, à condition qu’il ait lieu. Elizabeth Borne a déclaré qu’elle ne le solliciterait pas. Pour le déclencher, une motion de censure doit donc être déposée par l’opposition. Mais à l’exception de LFI, les appétits pour placer Macron dos au mur sont limités. Le RN et LR, en particulier, ont tout intérêt à laisser Macron gouverner tout en jouant la carte de l’opposition constructive. LR comme le RN pourraient donc s’abstenir face à une motion de censure de la gauche, permettant au gouvernement Borne de se maintenir tout en accusant LFI de chercher à provoquer le chaos. Libération révèle ainsi que l’Élysée a été rassuré par ses discussions avec le RN, et pense pouvoir compter sur l’abstention de l’extrême droite et d’un tiers des députés LR pour conserver le pouvoir. 

Il s’agit néanmoins d’un pouvoir minoritaire qui met fin à 5 ans de verticalité sans précédent. Chaque texte de lois et vote à l’Assemblée nécessitera forcément des négociations et compromis, bien loin de la pratique du pouvoir qui avait cours jusqu’à présent. La France va donc redécouvrir le parlementarisme, pour quelques mois au moins. 

Quel que soit le scénario qui s’imposera, la perspective d’une dissolution de l’assemblée à court ou moyen terme semble très probable. Elle interviendra vraisemblablement au moment qu’Emmanuel Macron jugera le plus opportun. Même s’il apparait de plus en plus indécis et incapable de se séparer de ses collaborateurs (y compris ses ministres battus aux législatives), le chef d’État risque d’être frustré par sa majorité relative au parlement. D’où l’importance pour la NUPES de se tenir prête, de continuer le travail d’opposition parlementaire et la coordination entre ses différentes composantes à l’intérieur et l’extérieur du parlement.

Ne pas se démobiliser : après Macron, ce sera la gauche ou l’extrême droite

Au risque d’enfoncer une porte ouverte, la politique ne se limite pas aux élections. Les conquêtes sociales et victoires se construisent en dehors des campagnes électorales. Au sein des entreprises, dans les collectivités, associations, avec des organisations militantes, dans la rue et son entourage. À l’échelle locale également.

La ville de Lyon, gouvernée par les verts, vient d’interdire de nombreuses formes de publicité. La gauche gouvernant les principales métropoles du pays, on peut imaginer la fin des panneaux publicitaires lumineux et de la pollution visuelle par ce biais, pour ne retenir qu’un exemple. Il ne tient qu’aux habitants de ces villes de se mobiliser.

Rester mobilisé, ne serait-ce que passivement, est également essentiel compte tenu du climat politique actuel. Une nouvelle législative est probable dans les 6 à 24 mois. De nombreux combats sociaux et troubles économiques sont à attendre d’ici là (risque de récession, de crise financière, d’effondrement de certains services publics, de pénuries d’électricité et de certaines matières premières…). Enfin, la présence inédite (et souhaité par le pouvoir) du Rassemblement National au premier plan de la vie politique nécessite de rester vigilant et de combattre sans cesse ses idées.

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Photo by Edrece Stansberry on Unsplash

Que ce soit lors de législatives anticipées ou en 2027, Emmanuel Macron finira par perdre le pouvoir. Soit il sera remplacé par un nouveau garant de l’ordre néolibéral (Édouard Philippe, Gérald Darmanin ?), soit par l’extrême droite. Du moins, c’est le “projet” du bloc bourgeois. L’alternative est celle d’une victoire de la gauche “radicale”. 

Rétrospectivement, cette gauche restait trop faible politiquement pour s’imposer autrement que par accident lors de la présidentielle de 2022 ou aux législatives qui ont suivi. S’il ne manquait pas grand-chose à Jean-Luc Mélenchon pour accéder au second tour face à Macron ou obtenir une majorité relative à l’Assemblée, il manquait encore beaucoup pour être majoritaire. Et encore plus pour obtenir la force requise à l’engagement d’une rupture franche avec les structures néolibérales qui imposent les politiques actuelles (on pense à l’Union européenne, à la finance mondialisée, à la mondialisation et au capitalisme actionnarial). 

Si l’échec relatif de la NUPES a de quoi décevoir et désespérer, son résultat permet néanmoins de franchir une étape nécessaire (mais pas suffisante) pour engager un véritable changement de politique susceptible d’impacter nos vies. C’est un premier pas, qui en appelle d’autres, à condition de ne pas renoncer à la politique.

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Pour une définition du “bloc bourgeois” (concept développé par les économistes et politologues Bruno Amable et Stefano Palombarini) et de ce qu’il recouvre (stratégie & programme politique), lire https://www.contretemps.eu/nupes-melenchon-gauche-rupture-strategie-entretien-palombarini/


Une réaction au sujet de « Que retenir des législatives (en attendant la dissolution) »

  1. « On a fait barrage, on a fait barrage »…
    Et on s’est bien fait avoir.
    En tant que Castor je sens que le prochain barrage ça va être « tout sauf Mac »! Et ça m’ennuie car ça ouvre un boulevard à l’extrême droite. Mais à qui la faute?

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