SNCF: un moment historique

SNCF: un moment historique

Le bras de fer qui oppose gouvernement et cheminots dépasse très largement la question de leur statut ou celle de la SNCF. Il nous concerne tous, car il recouvre deux questions décisives : celle du choix du modèle social français et celle de la nature de notre réponse face à l’urgence climatique.

Que l’on soit pour ou contre la politique du gouvernement, en faveur ou opposé aux grèves qui débutent, il est important de bien saisir les enjeux de ce moment historique.

1) Le point de vue du gouvernement : moderniser la France

Pour le gouvernement, il s’agit de moderniser la France pour l’inscrire pleinement dans la mondialisation. Compte tenu de la « difficulté à réformer » le pays, Emmanuel Macron a choisi de mener une offensive générale afin d’imposer les réformes nécessaires. Il faut agir vite, et avec détermination. (1)

Ainsi, les ordonnances de la loi Travail ont permis de profiter du momentum conféré par l’élection présidentielle pour imposer une loi El Khomri  2.0.  Depuis, le gouvernement attaque sur tous les fronts : suppression de l’ISF financée par une coupe drastique des budgets de la santé, réforme de l’assurance chômage, suppression du statut de la fonction publique, privatisation des aéroports de Paris et des barrages hydrauliques d’EDF, hausse de la CSG, austérité budgétaire pour passer sous la barre des 3 % de déficit, sélection à l’entrée de l’Université et réforme du bac… en allant aussi vite, le gouvernement déboussole et déstabilise les forces contestataires. C’est la fameuse tactique du blitzkrieg qu’avait promis de déployer François Fillon.

Quatre réformes majeures restent encore à mettre en place : celle de l’assurance chômage (en cours), de la fonction publique (amorcée), du système des retraites (prévue pour la fin de l’année) et de l’assurance maladie. Elles se justifient par un constat implacable : un chômage de masse que ne connaissent pas les économies américaines, britanniques et allemandes.

La réforme de la SNCF apparaitrait presque « anecdotique».  Elle s’inscrit pourtant dans une stratégie globale : les cheminots constituent le principal îlot de résistance, et le principal point d’appui de la contestation sociale. En supprimant ce statut et en démontrant ainsi sa capacité à réformer, Emmanuel Macron cherche à reproduire un « moment thatchérien » qui permettra d’ouvrir la voie aux réformes les plus sensibles (retraites et santé). Un blitzkrieg mené d’une main de fer.

 « L’obstacle SNCF franchi, on aura carte blanche pour réformer le pays »un proche conseiller d’Emmanuel Macron en février 2018, cité par Les Échos

Au-delà de son but politique, la réforme de la SNCF tire sa justification de l’ouverture à la concurrence. De ce point de vue, les préconisations du rapport Spinetta validées par Emmanuel Macron et Édouard Philippe (suppression du statut cheminot, reprise partielle de la dette, fermeture d’un quart du réseau ferroviaire…) sont cohérentes. (2)

Mais contrairement à ce que l’on entend généralement, ce choix n’est pas « inévitable » ni « imposé par Bruxelles». Les traités européens permettent en effet d’exclure certains secteurs « stratégiques » de l’ouverture à la concurrence. L’énergie nucléaire en constitue un parfait exemple. Quant à la région Ile-de-France, elle a repoussé l’ouverture à la concurrence du rail à l’horizon 2039….

Avec la réforme de la SNCF, Emmanuel Macron veut donc briser la capacité de résistance des syndicats avant de faire passer le prochain train de réformes.

2) Le point de vue des cheminots : sauver le service public

Contrairement aux pseudo-experts qui s’attachent à prendre les Français pour des imbéciles à longueur de plateaux audiovisuels, les cheminots ont compris la logique du gouvernement, et ont des arguments et un projet à lui opposer. (3)

Nous les avons détaillés dans un article précédent, mais rappelons certains éléments. Du point de vue des usagers, la réforme de la SNCF est une aberration qui défie toute logique. Elle s’oppose à 250 ans de science économique, systématiquement validée par les expériences empiriques. 

Photo: Collision d’un train de marchandises avec un train de voyageurs en Caroline du Sud. NPR

Le Financial Time dresse un bilan accablant de l’ouverture à la concurrence au Royaume-Uni : une hausse des tarifs de 30 % (en plus de l’inflation), un surcout de plusieurs milliards d’euros pour le contribuable et au final le rail le plus cher, le plus vétuste, et parmi les plus dangereux et les moins ponctuels d’Europe. En Allemagne, la mise en concurrence partielle coute huit milliards d’euros par an au contribuable, sur les seules lignes régionales. En Suède, la privatisation a instauré une désorganisation et un recul des investissements qui poussent 70 % des Suédois à demander le retour du service public. En Finlande, une gare sur huit a été supprimée. (4) Enfin, l’ouverture à la concurrence du fret ferroviaire français a entrainé une diminution par trois du trafic, au profit d’une hausse du transport routier subventionné par le contribuable, une multiplication par 35 des émissions de gaz à effet de serre, et une dégradation dramatique des conditions de travail des employés. (5)

Comme pour les employés de La Poste et d’Orange, ce qui attend les cheminots avec la suppression du statut, c’est une vague de suicides

Or, le magazine Capital explique que cette réforme du statut entrainerait un surcout significatif pour la SNCF (les cheminots hors-statut coutant plus cher en termes de primes et de salaires). (6)

Impact des différents modes de transport. Source: projet pour le rail de CGT Cheminots

Le projet défendu par la CGT-cheminots adopte une logique radicalement différente. Il place le rail au service du peuple et mise sur les synergies d’un service public intégré pour augmenter la fréquentation du réseau, réduire les prix, augmenter la qualité et développer le fret pour lutter contre le réchauffement climatique. Le tout sera financé par une fiscalité sur le transport routier et une reprise de la dette par l’État. Un projet « de bon sens » reposant sur les études détaillées de cabinets de conseil indépendants. (7)

3) Le point de vue climatique

Comme nous l’avions détaillé dans un article précédent, la situation climatique relève de l’extrême urgence. Si les tendances actuelles se poursuivent, la planète sera largement invivable dès 2050. Vous avez bien lu. Les scientifiques tirent le signal d’alarme et estiment à moins de 5 % nos chances d’éviter la catastrophe d’un réchauffement supérieur à deux degrés. Pour parvenir à sauvegarder notre mode de vie, nous devons réduire les émissions de gaz à effet de serre de 3 % par an pendant trente ans, avant d’arriver à des émissions négatives.

Quantité d’émission de C02 nécessaire pour atteindre différents niveaux de réchauffement climatique en 2100. En brun, la trajectoire actuelle, en bleu, celle nécessaire pour rester sous 1,5 – 2 degrés

Le réchauffement climatique est déjà là. Il jette sur les routes des dizaines de millions de réfugiés, provoque guerres et terrorisme. Il menace l’agriculture et l’accès à l’eau, y compris en France, et dès la prochaine décennie. Les émissions françaises sont reparties à la hausse. À l’échelle mondiale, la seule année de baisse jamais enregistrée correspond au paroxysme de la crise financière de 2008.

Echelle des températures moyennes mondiales et leurs effets.

Il ne fait aucun doute que même si nous parvenons à réduire nos émissions de 3 % par an à partir de 2020, nous allons devoir faire face à des modifications climatiques importantes. D’où l’urgence de s’organiser pour s’adapter à la crise climatique.

Face à ce constat (partagé par vingt milles scientifiques signataires d’un appel alarmiste), que fait le gouvernement ?

  • Il projette de remplacer 9000 km de voie ferrée par du transport routier émettant dix fois plus de C02
  • Il vend les aéroports, privant l’État d’un levier pour juguler le transport aérien
  • Il privatise les barrages hydrauliques d’EDF, la seule branche rentable et amortie de l’entreprise et son principal levier pour mener à bien la transition énergétique. Or, les barrages sont également essentiels pour la sécurité des centrales nucléaires et la gestion de l’accès à l’eau. (8)
  • Il prolonge les subventions à l’agriculture productiviste et supprime les aides à l’agriculture biologique, prolonge l’utilisation du glyphosate et des perturbateurs endocriniens 
  • Il met en place des accords de libre-échange (CETA, MERCOSUR, JETA) dont les effets sont, du propre aveu du gouvernement, désastreux pour le climat et l’agriculture durable (9)
  • Il confie à la finance les soins d’investir dans la transition écologique

Cette politique doit être contestée, car en plus d’accélérer le réchauffement climatique, elle détruit les capacités de réponse et de résilience sur lesquelles pourrait s’appuyer un projet politique alternatif.

4) Quel choix de modèle social pour les générations futures ?

La question du climat peut sembler subsidiaire, car l’impact de la réforme SNCF reste somme toute modeste. Certains pourraient cependant argumenter qu’un recul du gouvernement sur ce point permettrait de donner plus de poids aux questions écologiques dans les décisions politiques à venir, tout comme il pourrait ouvrir la voie au renoncement de la privatisation désastreuse des barrages EDF.

À l’inverse, en ce qui concerne l’avenir du modèle social français, personne ne conteste l’importance stratégique de la réforme SNCF. Nous devons donc détailler le fameux train des réformes qui doivent suivre.

Du point de vue du gouvernement, elles répondent à deux exigences particulières : s’adapter au monde qui change, et permettre de négocier une refonte de l’Union européenne.

Sur l’Europe, la stratégie d’Emmanuel Macron consistait à respecter les engagements budgétaires et à mener les réformes structurelles préconisées par Berlin pour pouvoir ensuite négocier une refondation de l’UE. Le président a atteint ses objectifs en un temps record : la réforme du marché du travail est déjà adoptée et le déficit budgétaire a basculé sous les 3 %.  Mais comme l’expliquait le journal Le Monde, les résultats des élections allemandes et italiennes ont fermé la porte à tout projet de réforme européen. De nombreux observateurs avaient jugé cette stratégie française vouée à l’échec, Macron leur a involontairement donné raison. (10)

Puisque la justification européenne n’a plus lieu d’être, reste le second objectif : la modernisation de l’économie française. Derrière ce terme se cachent des projets précis que nous allons brièvement expliciter.

Le marché du travail

Ce premier volet combine la réforme du Code du travail et la transformation de l’assurance chômage. Elle vise un but précis, explicité par le directeur de cabinet d’Emmanuel Macron et ancien responsable de campagne :

« Sur le travail, c’est vraiment la deuxième question la plus importante car, au bout du compte, l’essentiel est de savoir si les Français sont effectivement convaincus que mieux vaut des travailleurs pauvres que des chômeurs bien indemnisés » – Alexis Kholer, le numéro deux de l’Elysée selon Le Monde, directeur de cabinet d’Emmanuel Macron, cité par Le Temps/wikileaks.

C’est donc un choix de société clair, qui rejoint celui de l’Allemagne, des USA et de l’Angleterre.

 

La sécurité sociale : les retraites

Pour les retraites, le projet présidentiel se décline en deux temps. Le premier, explicité par Emmanuel Macron, cherche à transformer le modèle de répartition actuel (chacun contribue à une caisse qui redistribue les pensions mensuellement) par un compte individualisé et un système à points, qui soumet donc chaque individu aux aléas de la conjoncture économique. (11)

Le second point, explicité par le chef économiste d’Emmanuel Macron, vise à transformer le système de cotisation en un système de retraite par capitalisation boursière. C’est également ce que préconisait le rapport Attali de 2007, commandé par Nicolas Sarkozy et dont la coordination avait été confiée au jeune Emmanuel Macron. Cette recommandation fut abandonnée suite à la crise financière, mais revient désormais sur la table. (12)

La sécurité sociale : la santé

Reste la santé et l’assurance maladie. Le programme d’Emmanuel Macron proposait de « responsabiliser le citoyen » et de faire quinze milliards d’économies sur cinq ans. Ses premières mesures ont consisté en des coupes historiques dans le budget des hôpitaux et de l’assurance maladie (quatre milliards d’euros en 2017). La question des EHPAD est particulièrement intéressante, car le rapport de l’Assemblée nationale (validé par les députés En Marche) dresse un constat limpide : le sous-effectif entraine de la maltraitance. Et pourtant le gouvernement confirme qu’il n’a pas les moyens budgétaires de mettre fin à cette maltraitance. Le surcoût serait pourtant dérisoire, comparé aux trois milliards offerts aux plus riches contribuables en supprimant l’ISF.

Ces arbitrages comptables demeurent anecdotiques comparés à la réforme qui s’annonce. Selon Atlantico et Contrepoint, une note de l’Élysée révèle qu’Emmanuel Macron a l’intention de reprendre à son compte le projet porté par François Fillon, à savoir la privatisation de l’assurance maladie sur le modèle américain. Seuls les soins vitaux resteront à la charge de la sécurité sociale, comme c’est le cas aux États-Unis. Et le résultat est connu : un coût par contribuable multiplié par deux ou trois, un citoyen sur cinq privé d’accès aux soins et une espérance de vie en baisse. (13)

Le lecteur sera peut-être choqué par ces « révélations », mais elles sont pourtant cohérentes avec l’idéologie néolibérale d’Emmanuel Macron. À en croire les médias dominants, il n’y a pas d’alternative, le monde évolue…

5) La grève chez Carrefour : absence d’alternative ?

Carrefour, premier employeur privé de France, illustre parfaitement les enjeux du monde moderne. Le groupe a bénéficié de deux milliards d’euros d’aides publiques depuis 2013 dont quatre cents millions en 2016. Il a versé un demi-milliard de dividendes en 2016 et 354 millions en 2017.  Son ancien PDG comptait parmi les mieux payés du CAC 40. Son successeur, M. Bompard, est connu pour ses rémunérations record (12 millions en 2015, 14 en 2016). (14, 15)

Une du Parisien, journal de Bernard Arnault, qui est accessoirement le second actionnaire du groupe Carrefour, et à ce titre, a bénéficié d’environ 35 millions d’euros de dividendes en 2017.

En 2017, les profits de Carrefour s’effondrent du fait de la concurrence accrue du commerce en ligne. Le groupe prévoit de se séparer de 2400 employés (par un plan de départs volontaires) et devrait également supprimer 2100 emplois en magasin, afin de fermer 275 établissements. Une décision qui survient juste après le vote des ordonnances Travail d’Emmanuel Macron.

Si on met de côté le coût social et écologique de l’abandon des supérettes, cette stratégie d’entreprise semble relever du bon sens. Les employés licenciés seront pris en charge par la formation professionnelle que M. Macron veut privatiser (et dont le coût de fonctionnement sera répercuté sur les contribuables) pour qu’ils puissent retrouver un emploi, pourquoi pas dans un EHPAD.

Sauf que pour les employés, la pilule ne passe pas. Tandis que leurs PDG s’offraient des rémunérations en dizaines de millions et en versaient des centaines aux actionnaires, la prime d’intéressement du personnel est passée de 610 à… 57 euros. D’où les vingt-cinq mille grévistes de samedi dernier.

Image: La dépêche/ AFP

Du point de vue de l’intérêt général, on voit se dessiner le côté absurde, ou comique, de la séquence. Chaque contribuable a versé (environ) quatorze euros par an au groupe Carrefour via les dispositifs de types CICE, dans le but de sauvegarder de l’emploi. Cet argent a entièrement été capté par les actionnaires, pour aboutir à la suppression de 4500 emplois et de 275 commerces de proximité. Et maintenant, le contribuable va devoir mettre la main à la poche pour financer la formation de ces nouveaux chômeurs.

Il existait une alternative, qui aurait consisté à ne pas mettre en place le CICE, dont l’efficacité a été jugée désastreuse par la Cour des comptes, pour instaurer à la place un système d’emplois garantis où l’État devient employeur en dernier recours. Un tel mécanisme fournirait aux chômeurs le désirant des emplois publics « d’intérêt général », par exemple dans les EHPAD, financés par la collectivité. On résoudrait ainsi le fameux problème du chômage de masse sans créer de travailleurs pauvres, et cela pour un coût similaire, d’après les études citées par Médiapart. (16)

Quant à Carrefour, personne ne l’empêcherait de mener sa réorientation stratégique vers le commerce en ligne.

 

6) Un combat peut en cacher un autre

Il apparait donc évident que le gouvernement joue ici à quitte ou double. Si la réforme SNCF passe, tout passera. La France adoptera alors progressivement le modèle social américain. Et sur le terrain écologique, notre capacité de lutte contre le réchauffement climatique sera durablement écornée.

Par contre, si le gouvernement bute, un nouvel espoir proportionnel à l’ampleur du trébuchement naitra, sur le front écologique et social.

Dans cette seconde hypothèse, les conséquences peuvent varier du simple recul gouvernemental honorable qui ralentira le train des réformes, jusqu’à l’effondrement qui appellera, comme en 1995 et 1968, à de nouvelles élections. Voire à une destitution pure et simple du pouvoir.

Or, cela fait des décennies que les forces sociales n’avaient pas disposé d’un alignement de planètes aussi favorable. Il y a les étudiants galvanisés par les attaques des milices d’extrême droite effectuées avec le soutien d’une partie de la police. (17) Le personnel soignant, qui subit depuis des années un véritable supplice. Les employés des EHPAD, à qui la ministre vient d’expliquer préférer supprimer l’ISF que de leur donner les moyens de ne pas maltraiter leurs patients. Les fonctionnaires traités comme des parasites. Les chômeurs assimilés à des fraudeurs « fainéants ». Les Zadistes menacés d’expulsion illégale. Le personnel d’EDF qui refuse de voir son entreprise se faire démanteler et la sécurité des centrales nucléaires minée par les privatisations en série. Les militants écologistes, sur qui ont été lâchées les brigades antiterroristes. Et tous ces travailleurs du privé qui en ont gros sur la patate. Y compris d’innombrables cadres, victimes de burn-out, exposés à la violence managériale et la vacuité de leur « boulot à la con ».

Pour couronner le tout, les médias dominants maltraitent les Français à longueur d’antenne, insultant les grévistes, méprisant leurs auditeurs à coup de partis pris grossiers, lorsqu’ils ne fabriquent pas simplement des « fake news ». (18)

Si on devait retenir un sondage d’opinion révélateur, ce serait celui du JDD de dimanche dernier, qui montre qu’un Français sur deux approuve la grève des cheminots en dépit du matraquage médiatique et du biais de l’enquête.

Plus l’opinion publique s’informe, moins elle est dupe. Est-elle prête à accepter le modèle social proposé par Emmanuel Macron ?

Conclusion

Les faits sont sur la table, et à moins de refuser d’entendre que même le Financial Time dénonce la privatisation du rail, que même Capital dénonce la réforme du statut des cheminots, que même les compagnies pétrolières reconnaissent l’urgence absolue d’agir contre le réchauffement climatique, il devient évident qu’il faut rejoindre les cheminots pour faire tomber Macron.

Comment ? D’abord en faisant converger toute la colère et l’espoir dans la rue, le samedi 5 mai, comme le propose l’assemblée générale réunie à la bourse du travail par François Ruffin et Frédéric Lordon. Si un ou deux millions de Français défilent sur les Champs, tout le discours des journalistes s’effondre, et toute la légitimité du gouvernement disparait. Il faudra voir leurs mines excusées ! Il ne sera d’ailleurs pas certain que le gouvernement attende cette date pour faire marche arrière ni que la contestation ne prenne pas de l’ampleur bien avant, à commencer par le samedi 14 avril (à Marseille), le 19 avril (à Paris) et le 1er Mai (dans toute la France).

Ensuite, en organisant quotidiennement l’agrégation des nombreuses luttes en cours et en les soutenant. En participant aux AG étudiantes et cheminotes, en tractant avec eux sur les marchés, aux abords des gares, par internet. En menant la bataille de l’opinion autour de soi. Ce ne sont pas les pistes qui manquent.

Il ne s’agira pas de simplement dire « non », mais également de proposer un « oui » pour une alternative. Nous y reviendrons.

***

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Notes et références :

De nombreuses affirmations sont étayées par des liens hypertextes dans l’article. Les principales sources sont néanmoins listées ici:

  1. La stratégie d’Emmanuel Macron, décryptée par Le Monde diplomatique ici, emprunte tout autant à la logique de Margaret Thatcher qui consiste à « faire un exemple », qu’à celle du premier ministre néozélandais Roger Douglas qui généralisait le concept d’offensive générale consistant à ouvrir autant de dossiers possible en simultané pour paralyser les syndicats.
  2. Deux mois avant la sortie du rapport Spinetta, Emmanuel Macron en déclinait déjà les principales recommandations devant les cheminots lors de l’inauguration de la LGV Paris-Rennes. Edouard Philippe avait fait siennes les recommandations du rapport à sa sortie, et le projet de loi déposé par la ministre des Transports conserve la même logique d’ouverture à la concurrence et modification des statuts en vue de la privatisation.
  3. Sur le rôle joué par les médias, lire le dossier d’Acrimed. http://www.acrimed.org/Aux-grandes-reformes-les-grands-experts-le-cas-de
  4. Retrouvez les sources dans notre article sur la réforme de la SNCF.
  5. Lire Médiapart : Fret ferroviaire, désastre de l’ouverture à la concurrence.  https://www.mediapart.fr/journal/france/020418/fret-ferroviaire-le-desastre-de-l-ouverture-la-concurrence?onglet=full
  6. Capital https://www.capital.fr/entreprises-marches/la-suppression-du-statut-des-cheminots-pourrait-couter-plus-cher-a-la-sncf-1277703
  7. Nous ne saurions vous recommander assez de lire le rapport CGT-Cheminots disponible en téléchargement ici.
  8. Lire Le vent se lève http://lvsl.fr/scandale-de-la-privatisation-des-barrages-une-retenue-sur-le-bon-sens
  9. http://lvsl.fr/le-ceta-signe-larret-de-mort-de-la-cop-21
  10. Lire cette analyse du journal économique La Tribune 
  11. Lire Bernard Friot, « Vaincre Macron« , ed. La fabrique. Pour les intentions du président, se rapporter à ses propres déclarations lors de la campagne présidentielle (notamment L’Emission Politique et Médiapart)
  12. Lire cet interview débat de Jean-Marc Daniel, économiste responsable de la campagne d’Emmanuel Macron, avec Liêm Hoang Ngoc, économiste de la campagne de Mélenchon. La question des retraites est traitée vers la fin. 
  13. Lire notre article La bataille de l’assurance maladie aux Etats-Unis
  14. Lire: Médiapart: https://www.mediapart.fr/journal/economie/300318/chez-carrefour-la-greve-contre-les-licenciements-et-les-dividendes?onglet=full
  15. Chiffres des aides publiques, recoupables facilement avec une recherche google
  16. Médiapart: https://www.mediapart.fr/journal/france/190118/et-si-l-etat-creait-lui-meme-les-emplois-pour-combattre-le-chomage
  17. Non seulement la police n’est pas intervenue pour arrêter les milices d’extrême droite, mais des révélations accablantes montrent qu’elle a essayé d’étouffer l’affaire et de faire pression sur un témoin clé à coup de menaces pour qu’il modifie sa déposition, comme le révèle Médiapart. 
  18. Une fois de plus, on vous renvoie au travail d’Acrimed.org

6 réactions au sujet de « SNCF: un moment historique »

  1. Bonjour,
    Merci pour votre article.
    L’enjeu, selon Bernard FRIOT, est de transformer l’opposition à la politique de Macron en un mouvement de proposition dont l’objet soit désirable.

    1. De même, comment trouver une action affirmative pour les syndicats ? La grève tourne une partie du public contre les grévistes puisque cette action négative fait peine à tous.

      Si les syndicats ne gagnent pas l’enjeu politique, l’autre ressort serait de fonder sa propre entreprise privé afin de rivaliser le capital.

    1. La politique Européenne, qui a été rejetée à la majorité de 55% en 2005 par les français, vise à aligner le tissu économique du vieux continent sur celui des USA, rien d’autre.
      « Il ne peut y avoir de vote démocratique contre les traités européens », dixit Juncker. Tout est dit, la dictature est officielle!
      2005 est le point de rupture qui a permis tout ce qui suit. Maintenant, ils ne prennent plus la peine de « prendre des gants », si tant est qu’ils en aient pris un jour!

  2. Super article. Merci.
    Rien à redire sur ce tour d’horizon percutant. J’apprécie la longueur de vue.
    Juste un petit complément. Sur Carrefour, allez voir la dernière vidéo d’Arlette Charlot (https://www.cuisinedespatrons.com/), elle analyse que les pertes de cette année sont largement fictives et manipulées

  3. Merci, très bon article.
    Bienvenue dans un nouvel ordre mondial.
    66,… l’auraient soit-disant élu.
    La belle France des moutons.
    Nous sommes la risée du monde.
    Tout cela va au-delà de la politique. Ce n’est que l’envers du décor.
    Bon courage à tous.

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